Le yield management ou « gestion du rendement » est utilisé depuis de nombreuses années dans les secteurs de l’hôtellerie, du transport et des loisirs. Aujourd’hui, l’analyse et le traitement d’énormes volumes de données (Big Data) ont donné une nouvelle dimension à cette pratique commerciale.
Dans cet article, on vous propose de voir ensemble une définition du yield management et d’en comprendre l’intérêt en l’illustrant avec des cas concrets d’utilisation.
Définition du Yield management
Le terme anglais yield désigne la marge commerciale, c’est-à-dire la différence entre le prix de vente et le coût d’achat pour produire un bien ou un service. Comme illustré dans le schéma ci-dessous, la demande habituellement décroît lorsque le prix augmente. En effet, plus le prix d’un produit ou d’un service est élevé, plus le nombre de clients disposés à l’acheter diminue. Par exemple, peu d’acheteurs sont disposés à payer pour louer des jets privés car leur prix est très élevé.
Maintenant, intéressons-nous aux vendeurs. La courbe de l’offre montre comment ceux-ci réagissent à une augmentation du prix. Dans la plupart des situations, plus le prix d’un produit ou d’un service augmente, plus les vendeurs souhaiteront proposer davantage de ce produit ou de ce service. Ils le produisent alors en plus grand quantité. Vous vous souvenez du boom du marché smartphones au début des années 2000 ? La quantité de smartphones vendus dans le monde a rapidement augmenté quand les vendeurs ont réalisé que le marché était disposé à payer un prix élevé pour ce produit.
Agissant en sens contraire, la demande et l’offre se rencontre donc en un point dit « point d’équilibre ». Quand le point d’équilibre est atteint, cela signifie que le marché est efficient car la demande répond exactement à l’offre et l’offre répond exactement à la demande. Ce concept compris nous amène alors à une définition du yield management :
Le yield management consiste à faire varier le prix d’un produit ou d’un service à la hausse ou à la baisse pour améliorer la marge commerciale.
Pour le dire autrement, le yield management consiste à vendre :
- au bon client,
- au bon moment,
- au bon prix.
L’ajustement se base sur un certain nombre de facteurs pour assurer une demande optimale et donc le meilleur rendement possible. Le yield management est donc une approche basée sur les données. Le même produit peut ainsi être vendu à deux clients à des prix totalement différents.
Les différents types de yield management
Le CNC (Conseil National de la Consommation) distingue deux mécanismes : le yield management ascendant et le yield management dynamique.
- Le yield management ascendant consiste à augmenter le prix dans le temps jusqu’à la date de disponibilité du produit ou du service. Ainsi, plus vous réservez à l’avance, plus vous bénéficiez d’un prix avantageux.
- Le yield management dynamique consiste à faire varier le prix à la hausse ou à la baisse en fonction de nombreux paramètres tels que la durée jusqu’à la date de disponibilité, le comportement des clients et le nombre d’unités encore disponibles.
Quels produits ou services ?
Stock périssable
Le stock de produits ou de services doit être périssable, c’est-à-dire que les unités disponibles sont limitées dans le temps. Une chambre d’hôtel ou un siège au sein d’un vol commercial est un produit périssable. Si la chambre ou le siège ne sont pas vendus à la date de leur disponibilité, alors ils seront définitivement perdus.
Capacité de production non ajustable
Une fois l’hôtel ou l’avion construit, il est difficile d’ajouter des chambres ou des sièges. L’ajout de nouvelles capacités nécessitent de nouveaux investissements.
Produits réservables
Une chambre d’hôtel ou un billet d’avion commercial se réserve plusieurs jours voire plusieurs mois à l’avance. La question est donc de savoir si dans le lapse de temps jusqu’à sa mise à disposition, un client serait prêt à payer un prix plus élevé.
Demande fluctuante
La demande est fluctuante dans le temps avec des périodes de forte activité et des périodes creuses. La demande pour une chambre ou un billet d’avion fluctue grandement en fonction de la période de l’année, du jour dans le mois et même du jour de la semaine.
Segmentation de la clientèle
Les produits ou services peuvent être vendus à des prix différents selon le profil des acheteurs. Par exemple, un hôtelier traitera différemment les touristes et les personnes réservant une chambre pour un déplacement professionnel.
Coûts fixes élevés et coûts variables faibles
Le coût pour louer une chambre ou un siège supplémentaire est marginal par rapport aux coûts fixes d’un hôtel ou d’un avion.
Qui utilise le yield management ?
A l’origine, le yield management a été utilisé par les compagnies aériennes au moment de la dérégulation du trafic aérien aux États-Unis dans les années 1980. Face à la nouvelle concurrence des compagnies low cost, l’objectif consistait à maximiser le taux d’occupation des avions. En effet, un site inoccupé est une perte directe pour l’entreprise qui ne pourra jamais être rattrapé. Le yield management est ensuite devenue très populaire au sein de l’industrie hôtelière.
Parmi les principaux produits ou services susceptibles de tirer un réel bénéficie du yield management, on compte donc :
- Les chambres d’hôtel
- Les billets d’avion
- Les places de concert ou pour assister à un évènement sportif
- La location de véhicules
- Les restaurants
Pourquoi utiliser le Yield management ?
Le yield management permet d’augmenter le chiffre d’affaires et la rentabilité en augmentant le taux de remplissage pour un produit ou un service donné.
Durant les périodes de forte demande, il permet de maximiser le prix. À contrario, durant les périodes creuses (baisse de la demande), il permet de maximiser le taux d’occupation.
Yield management : cas d’utilisation
Voyons en détail quelques cas concrets d’utilisation :
Hôtellerie : gestion du stock disponible
Le but recherché est d’ajuster le prix du produit (ici, une chambre d’hôtel) pour maximiser le taux d’occupation au meilleur prix. La demande est saisonnière. Elle sera généralement plus élevée en été qu’en hiver, ce qui poussera l’hôtelier à augmenter les prix sur cette période.
VTC : gestion en temps réel
Le prix d’une course en VTC dépend de la demande attendue mais aussi de la demande en temps réel. Ainsi, si la demande augmente soudainement au même endroit, les prix vont également augmenter.
Les limites du yield management
Une mise en place souvent complexe
La mise en place du yield management nécessite du temps. Pour être efficace, il est nécessaire de construire un modèle pertinent basé sur des données fiables.
Utile uniquement pour certains produits / services
Comme déjà indiqué, le yield management ne s’applique pas à tous les produits et services. Ceux-ci doivent être limités (la capacité de production ne peut s’adapter à la demande), périssables (ils sont perdus s’ils ne sont pas vendus) et réservables (le client doit pouvoir acheter le produit ou le service pour une utilisation future).
La volatilité des prix peut causer un bad buzz
Le yield management peut causer une grande volatilité des prix. Les commentaires de certains clients frustrés peuvent alors nuire à l’image de marque de l’entreprise. Ils peuvent se sentir floués. Un bon exemple est celui du prix des billets de trains qui est régulièrement brocardé pour son manque de lisibilité. Autre exemple : l’ajustement en temps réel des courses en VTC a causé plusieurs polémiques, notamment à l’occasion d’attentats. Les compagnies de VTC ont ainsi été vivement critiquées car leur algorithme a ajusté les prix à la hausse en raison du nombre croissant de personnes cherchant à fuir les zones touchées.
Protection des consommateurs
Enfin, le traitement massif de données nécessaire à la mise en place d’une stratégie de yield management pose des questions éthiques de protection des consommateurs. Celle-ci sont résumées dans un rapport du Conseil National de la Consommation en janvier 2020. Le prix d’un produit est ainsi encadré par l’article L. 121-1 du code de la consommation qui énonce qu’un prix ne doit pas être trompeur.
Yield management vs. Revenue management
Ces deux concepts sont souvent confondus. Bien qu’ils partagent de nombreux points communs, ils diffèrent dans leur périmètre et leur objectif.
Le Revenue management est une pratique qui consiste à anticiper le comportement du consommateur pour maximiser ses dépenses dans nos produits ou services. En d’autres termes, le Revenue management est centré sur le consommateur plutôt que sur un produit ou un service comme le yield management.
Prenons le cas d’un hôtel pour illustrer cette différence :
- Le yield management vise à vendre la bonne chambre au bon client au bon moment pour le prix le plus élevé possible. Cela entraînera généralement une augmentation du prix en période de forte demande et une baisse du prix en période creuse.
- Le Revenue management vise lui plutôt à maximiser les dépenses de ce client dans l’ensemble des produits et services proposés par l’hôtel. Ainsi, au-delà de la location d’une chambre, cela peut inclure les dépenses au restaurant, au bar, au spa ou auprès du service de conciergerie de l’hôtel.
Le Revenue management possède donc un spectre plus large que le Yield management. Pour cette raison, il repose encore davantage sur la collecte et l’analyse de données. Le Yield management peut donc être vu comme une étape vers le Revenue management (son concept est d’ailleurs antérieur).
Le yield management à l’heure du Big Data
Nous sommes entrés dans une ère où le volume de données qu’il est possible de collecter est devenu gigantesque. Fondamentalement, le principe du yield management reste le même : faire varier le prix pour maximiser la marge commerciale. Ce qui change c’est l’utilisation d’algorithmes et de l’intelligence artificielle pour traiter des données qui dépassent les capacités cognitives d’un être humain.